Tout d'abord, voici une question préliminaire à laquelle il a toujours été difficile de répondre : est-il possible de définir une creepypasta ? Là-dessus, j'ai un avis qui n'a pas ou peu changé depuis que je me suis penché sur ce problème : oui, mais difficilement. Soyons tout de suite clair, il ne s'agit pas de dire que le terme « creepypasta » est un vaste fourre-tout dans lequel on peut faire rentrer un peu n'importe quoi, ou qu'il est impossible de définir des règles générales se retrouvant dans toutes les creepypastas. À vrai dire, ce dernier point à souvent été ce qui rendait le travail de définition difficile pour une raison qui me paraît maintenant assez évidente : il y a des règles générales qui s'appliquent aux creepypastas, mais la réciproque n'est pas vraie, les creepypastas n'obéissent pas forcément aux règles générales. Comprenez par là que vous pourrez trouver deux créations presque antonymiques et qui pourtant appartiendront toutes les deux au genre des creepypastas, quand une troisième création extrêmement proche en apparence de la première ou de la deuxième en sera exclue.
Cette considération faite, il convient maintenant d'observer sous quelles formes se décline la creepypasta. Au cours de mes recherches, je suis parvenu à la conclusion qu'il y a trois aspects qui priment : l'Esprit, la Technologie et l'Artificialité. Ces deux aspects sont essentiels à la genèse d'une creepypasta et constituent par la même occasion une difficulté supplémentaire dans la recherche du sens.
Concentrons-nous tout d'abord sur l'Esprit. Lorsque l'on s'intéresse au genre, il apparaît très vite que les creepypastas se déclinent sur tous les supports multimédias existants, qu'il s'agisse de texte, d'audio, de vidéo, d'un support multimédia comme un jeu ou même d'un mélange de tous ces éléments. Quel rapport avec l'Esprit ? Si vous vous êtes posé cette question, sachez que votre formulation est, dans son fondement, erronée. En effet, il n'y a pas de rapport qui découle de ces supports, l'Esprit précède au contraire les supports comme il les suit. Peu importe comment sera créée la creepypasta, son essence même sera transférée dans un esprit déjà conditionné pour la recevoir, autant directement (le fait que vous alliez consciemment consulter une creepypasta ou tout autre élément horrifique) qu'indirectement (votre esprit est prédisposé à être réceptif à ce genre d'histoire par l'action des contes de votre enfance, des films que vous regardez et des informations que vous recevez du monde extérieur). Aussi, ce ne sera plus le souvenir d'un texte, d'une vidéo ou d'un jeu qui sera gravé dans votre esprit, mais le contenu d'une petite légende, voire d'un mythe. Ainsi, le support de transmission d'une creepypasta appartient aux catégories susmentionnées, mais le support d'existence de ces mêmes creepypastas est l'Esprit. Il entre dans votre inconscient, se mêlant aux récits dont vous ne savez plus trop s'ils sont vrais ou faux, et les plus « populaires » rentrent dans l'inconscient collectif.
Comme je l'ai dit plus haut, le deuxième aspect notoire des creepypastas est la Technologie. Il s'agit d'un thème qui est déjà plus connu de tous et dont j'ai déjà brièvement traité plus haut à la mention des supports multimédias. Les creepypastas s'appuient en effet essentiellement sur les nouvelles technologies et se différencient en cela des légendes urbaines en général, sans toutefois en quitter la sphère. Si l'on y réfléchit, on arrive très vite à la conclusion que les creepypastas sont des légendes urbaines 2.0, j'en veux pour preuve le transfert presque inaperçu d'anciennes légendes urbaines comme Bloody Mary dans le genre. En outre, les légendes urbaines possèdent également l'aspect que nous avons mentionné dans le paragraphe précédent, à savoir la dépendance à l'Esprit. Ce qui les place dans une catégorie à part est donc, disais-je, l'emploi des nouvelles technologies. On le voit dans leurs supports mais également dans leur mode de propagation primaire (leur mode de propagation secondaire étant le même que celui des légendes urbaines, à savoir le bouche-à-oreille). S'il existe des projets d'ouvrage recensant diverses creepypastas, elles demeurent pensées pour une utilisation online et seules celles se limitant aux textes et, à la limite, aux images, peuvent être retranscrites fidèlement sur support papier.
Le dernier point est fortement lié au troisième aspect, l'Artificialité. Si l'on porte un regard sur la création (terme déjà lourd de sens) des creepypastas, on peut leur imputer des « attentes » que le tirage papier ne saurait satisfaire pleinement. Le propre de ces créations est en effet de se répandre le plus rapidement possible, calquant ainsi le mode de fonctionnement de notre société moderne dans laquelle l'information se déplace à une vitesse toujours plus vertigineuse. La raison de ce développement semblable à celui d'un virus qui infecterait une partie de la mémoire pour s'y installer durablement réside dans leurs créateurs. Il faut bien garder à l'esprit que les creepypastas sont créées dans le but de s'imposer dans l'esprit d'autrui en suscitant un sentiment de malaise, tout comme le feraient des légendes urbaines. La différence majeure avec ces dernières, c'est bien qu'elles sont fabriquées de toutes pièces dans ce but et ne sont pas le résultat de décennies de bouche-à-oreille qui ont finit par transformer un évènement peut-être anodin en une sordide histoire vous hantant jusque dans vos cauchemars. Il leur faut donc partir de zéro et arriver très vite au même niveau que leurs aînées les légendes urbaines. Les nouvelles technologies sont pour cela un avantage indéniable, et même un passage obligé si l'on veut donner l'impression (facilement démontable) qu'elles existent depuis bien longtemps. C'est ce qui a mené bon nombre d'auteurs à se tourner vers les sites communautaires rassemblant un grand nombre de creepypastas, et est peut-être à l'origine de leur déclin aujourd'hui, car la quantité finit toujours par nuire à la qualité et les objectifs toujours plus apparents des créateurs les moins expérimentés détournent, volontairement ou non, les creepypastas de leur but premier.
Maintenant que l'on a fait le tour des aspects théoriques de la question, il convient de s'intéresser à la pratique : qu'est-ce qui fait une creepypasta ? Pourquoi Slenderman est-il un excellent exemple, pourquoi Jeff the Killer est-il un excellent contre-exemple ? Pourquoi me dit-on toujours que mes créations ne remplissent pas les critères attendus malgré l'acharnement que je fournis à mon travail ? La définition pratique de la creepypasta, comme nous l'avons vu en début de démonstration, n'est pas chose aisée, aussi nous allons passer en revue les différentes choses qui ne font PAS une creepypasta et quelques règles générales qu'il faudra toujours garder en tête sans non plus se forcer à toutes les respecter à la fois.
Depuis le début de 2014 approximativement, la limite entre creepypastas et nouvelles horrifiques ou fan-fictions suscite toujours plus d'interrogations, non pas parce que le genre est en train d'évoluer vers elles, mais tout simplement parce que la vague des nouveaux auteurs arrivent en terrain inconnu en proposant des choses qui, elles leur sont au contraire trop bien connues (attention, je parle ici de genre littéraire, le fond des histoires est, lui, souvent influencé inconsciemment). Certains finissent par se demander ce qui différencie les trois genres que nous avons cités plus haut. La fan-fiction ne possédant que peu de différences avec la nouvelle, je ne ferai que les mentionner lorsque cela se révélera nécessaire.
Le point commun sur lequel tout le monde se base inconsciemment est l'Artificialité dont j'ai traité dans la partie théorique. Il est vrai que si l'on ne cherche pas très loin, les creepypastas comme les nouvelles, et comme beaucoup d'autres choses d'ailleurs, sont créées de toutes pièces dans le but d'être diffusées, de préférence largement. On arrive pourtant déjà aux limites de la similarité parfaite. Un point qui peut paraître controversé est le premier aspect dont j'ai traité, l'Esprit. En effet, certains récits ont également vocation à marquer l'inconscient collectif, comme par exemple les œuvres de Tolkien qui avaient pour but avoué de « fournir une mythologie à l'Angleterre ». Il ne s'agit ici pourtant pas de la même chose, car la marque que les creepypastas veulent laisser dans l'Esprit se veut telle qu'elle se confondra avec la réalité, avec le « Monde Primaire », tandis que, pour reprendre le même exemple, les œuvres de Tolkien sont faites pour s'évader dans le « Monde Secondaire » afin de redécouvrir le « Monde Primaire ».
Pour en revenir plus précisément aux nouvelles et fan-fictions proposées par les auteurs que l'on pourrait qualifier de « new wave », je n'irai pas jusqu'à dire que de telles ambitions aient effleuré leurs esprits, en revanche je peux bien me représenter l'attrait que représente la publication d'une de ses propres créations à un endroit qui fait figure d'autorité dans un domaine quel qu'il soit. Il s'agit là d'un souhait de recevoir d'une part la reconnaissance de ses semblables, de se sentir membre d'un groupe bien démarqué des autres, et par ailleurs de la fierté de son travail personnel que l'on peut exhiber à des personnes proches ou moins proches en se disant qu'il a été apprécié par un nombre non-négligeable de personnes, lu par un nombre encore plus grand et reconnu comme une création de qualité. Cet objectif de reconnaissance, caractéristique des jeunes de la société actuelle, prend souvent le pas sur le reste, au point de ne pas prêter trop attention à la nature de ce que l'on essaye de faire, pourvu que notre création parvienne rapidement aux yeux de tous et nous amène les louanges.
Pour cette raison, il serait bénéfique pour la survie des creepypastas que les personnes en charge de leur publication, quelle que soit leur nationalité, prêtent attention non plus seulement au fond mais aussi à la forme des créations qu'ils reçoivent. Que l'on se place dans l'optique d'une fan-fiction ou d'une nouvelle, le point le plus destructeur pour les creepypastas est le fait qu'elles s'assument parfaitement comme des fictions et n'essayent pas de s'intégrer dans la réalité comme si elles en avaient toujours fait partie. C'est pour cette raison, d'ailleurs, que l'on prête souvent beaucoup d'attention au personnage principal, alors que cela n'est pas nécessaire et même parfois néfaste dans le cadre d'une creepypasta. Si l'on veut se prêter brièvement à l'analyse littéraire, la fan-fiction s'intéresse exclusivement aux faits de ses protagonistes (qui sont souvent ou un personnage déjà existant, ou l'auteur placé dans un monde préexistant, ou une personnification des fantasmes de l'auteur, ou plusieurs d'entre eux), la nouvelle suit globalement cette tendance (quoique pour des raisons de style, cette règle ne soit pas toujours respectée), et la creepypasta a pour sujet principal l'antagoniste, qu'il s'agisse d'une entité propre, d'une série d'évènements, d'un jeu ou de quoi que ce soit d'autre. La focalisation du récit (quand il s'agit bien d'un récit) n'a aucune incidence sur cet aspect.
Un autre point caractéristique qui s'inscrit dans les nouvelles (et dans une moindre mesure dans les fan-fictions) mais pas dans les creepypastas est le vocabulaire et le style employés. Dans un souci de réalisme, les creepypastas textuelles sont souvent rédigées de la même manière que l'on pourrait adresser un message un peu longuet à un ami sur Facebook, ou un e-mail. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'on fuit comme la peste les temps de narration utilisés en littérature (en français le passé simple) pour rechercher des temps que l'on emploierait aussi bien à l'oral qu'à l'écrit pour raconter une anecdote (en français le passé composé). Quand le texte n'est là que pour servir une image, une vidéo ou un audio (et pas l'inverse, dans ce cas se référer à la phrase précédente), ces points n'ont en général pas grande importance, si quelques faux pas évidents sont à éviter, la taille modeste parfois limitée à quelques lignes de la rédaction laisse une plus grande importance au fond en négligeant fortement la forme.
Lorsqu'il s'agit d'une nouvelle, en revanche, le style est beaucoup plus poussé, beaucoup plus recherché, même pour des personnes qui n'ont pas forcément beaucoup d'expériences dans le domaine (auquel cas il est maladroit en plus d'être inadapté). C'est pourquoi, dans une creepypasta, on préférera « la créature s'est jetée sur moi » à « le monstre sanguinaire dont la bouche entrouverte laissait encore s'échapper quelques gouttelettes d'un sang épais, lui offrant un effroyable sourire carnassier pouvant glacer le sang du plus courageux des hommes, se ramassa sur elle-même comme si elle voulait s'enfoncer dans le sol et tendit soudainement ses jambes comme un ressort, parcourant les quelques mètres qui nous séparaient en une fraction de seconde à la manière d'un oiseau de proie [...] ». On peut parfois, dans la limite du raisonnable, s'offrir une ou deux comparaisons audacieuses, mais il faut alors les adapter au style réaliste (« On aurait dit... »). Le style est, par exemple, très bien maîtrisé dans la creepypasta Eyeless Jack.
Un autre élément de style très - et même trop - utilisé dans les creepypastas à tord est le dialogue. Présent dans la nouvelle de manière habituelle, il est énormément utilisé dans la fan-fiction (alors que la recherche du style mentionnée au paragraphe précédent peut être délaissée, ce qui peut faire croire, de prime abord, qu'on a atteint l'objectif que l'on recherchait), faisant partie intégrante de la démarche d'un récit se rapprochant au possible des faits de l'histoire en essayant au possible de s'intéresser aux actions des protagonistes, qui ont en général une visée très claire (histoire d'amour, bataille épique,...) sans trop alourdir la forme. Lorsqu'on se lance dans la rédaction d'une creepypasta, malgré cette recherche similaire de la précision et de la concision, on reste dans l'optique du récit spontané, raison pour laquelle les dialogues sont (ou du moins devraient être) utilisés avec parcimonie. En effet, que l'on soit en train de raconter une histoire à ses amis ou dans une situation d'extrême urgence laissant peu de temps, il est relativement rare que l'on se rappelle des moindres détails d'une conversation et qu'on les retranscrive avec les marqueurs habituels du discours direct en littérature.
Pour palier à ce problème, il suffit en général de se demander comment on raconterait l'histoire et les paroles rapportées si on s'adressait à un public sans le texte. Dans la majorité des cas, le discours indirect sera employé, et seul un résumé de la conversation sera fait. De manière paradoxal, l'histoire la plus connue de Jeff the Killer est à la fois un exemple et un contre-exemple de cet élément. D'un côté, on a la phrase devenue culte « Ne suis-je pas beau » qui, par son caractère très marquant et sa brièveté, pourrait très bien être retranscrite telle quelle dans une creepypasta, mais le reste du texte, souvent entrecoupé de dialogues, est rédigé en suivant le modèle d'une fan-fiction, intégrant même de manière éhontée le fantasme de l'adolescent faible qui cache une puissance destructrice en lui et s'en sert pour se venger de ceux qui l'ont opprimé. C'est d'ailleurs cet aspect qui attire la sympathie (ou plus) d'un grand nombre d'adolescents malgré l'horreur de ses actions, quand un tueur tel que le Taxidermiste, pas si différent que ça dans le fond, reste un monstre effrayant.
Enfin, une des erreurs souvent commises réside dans la cohérence du récit que l'on fait. Il faut ici rappeler une règle utilisée en littérature qui est employée pour les creepypastas de manière un peu différente : « le narrateur ne ment jamais au lecteur ». Dans le cadre d'un récit littéraire, cette règle est employée pour que l'auteur reste toujours fidèle à son histoire et au paysage d'arrière-plan de l'histoire (pour éviter des énormités comme « le héros était coincé, mais soudain il se rappela qu'il avait passé trois ans dans un monastère pour apprendre les secrets de la téléportation et put ainsi échapper in extremis à ses ennemis »). Dans le cadre d'une creepypasta, quoi qu'il arrive, il faut bien se rappeler que l'arrière-plan de l'histoire, quelle qu'elle soit, est le monde réel.
Cela ne signifie pas que l'on ne peut y faire entrer d'éléments surnaturels, mais que si c'est le cas, il faut pouvoir les intégrer à la réalité d'une manière indiscutable, quand bien même cet élément serait énorme. C'est une des raisons pour laquelle l'histoire de Slenderman est un exemple parfait de creepypasta, ayant intégré son personnage à la fois dans l'imaginaire collectif et dans la réalité. La triste affaire du Wisconsin, malgré sa dimension scandaleuse et son ridicule du fait de la mésinterprétation qu'on faite les deux jeunes filles du mythe de Slenderman, prouve à quel point cette légende a réussi à prendre une place digne de celle du Croque-mitaines. Dans un autre registre, une intégration dans la réalité excellemment bien réussie est celle du syndrome de Lavanville. Le contre-exemple est encore une fois Jeff the Killer qui est parsemé d'invraisemblances mineures ou majeures, comme la naïveté absolue des médecins ou la conservation de sa vue malgré ses paupières brûlées. Sonic.exe contient également un grand nombre d'énormités de la part du personnage principal qui empêchent sa crédibilité, au détriment de l'inventivité de l'auteur qui a réussi à faire des caractéristiques de son histoire des clichés de la creepypasta sur un jeu vidéo. Dans une moindre mesure, l'histoire d'Eyeless Jack contient également quelques invraisemblances.
Un dernier point qu'il convient de soulever dans ce que ne sont pas les creepypastas n'appartient à aucun genre en particulier, et est donc placé à part de la démonstration. Il s'agit d'un point étroitement lié au terme creepy (souvent traduit à tord par horrifique mais qui a donné le néologisme plus juste de glaucopie) qu'il convient de définir dans le cadre de ce genre. Le mot qualifie ici un élément provoquant de manière générale le malaise, le dégoût ou l'angoisse (souvent confondue avec la peur) chez celui qui l'observe. La méprise sur la définition du terme a donné lieu à un bon nombre de créations largement inférieures aux attentes que l'on peut avoir car basées exclusivement sur la présence d'un élément effrayant, la mort du narrateur ou de la seule personne ayant connaissance de l'histoire (ce qui entre de plus en contradiction avec le point précédent), ou encore de gore. Bien que ce dernier élément provoque assurément le dégoût chez le lecteur, il est souvent utilisé à outrance dans un texte dont la forme n'est pas travaillé dans le but de devenir une creepypasta, et est même parfois utilisé « gratuitement », dans la volonté de faire « du gore pour du gore », ce qui possède à peu près les mêmes défauts qu'un style d'écriture trop travaillé mais provoque une envie de vomir au lieu de l'admiration devant la beauté du texte. L'abondance de gore ne nuit pas forcément, comme le montre la creepypasta Beautiful Organs, mais elle se doit d'être utilisée de manière très réfléchie.
Cet exemple sur le gore retranscrit bien les erreurs souvent commises pour tous les éléments cités précédemment. Les nouveaux auteurs pensent souvent à tord qu'il suffit de faire mourir le personnage à la fin d'une histoire (qui sera en plus fort probablement écrit comme une nouvelle !) ou d'y intégrer un monstre pour faire une creepypasta, alors que le genre demande beaucoup plus de subtilité au-delà de la simple forme. Pour illustrer cela, on peut prendre l'exemple d'Une autre chaîne ou des Dernières serviettes qui, pour l'une, jouent sur l'inquiétude et l'impossibilité de savoir, et pour l'autre sur le dégoût inspiré par la découverte de la provenance des serviettes. Le point commun entre les deux sentiments éveillés, bien que fondamentalement différents, est une sensation traduite par l'expression être pris aux tripes. Ces histoires ont beau être relativement anodines, elles peuvent donner l'impression au lecteur d'être souillé l'espace de quelques instants, d'avoir une sorte de chatouillement au niveau de l'estomac ou dans le bas du dos dont il n'arrive pas à se débarrasser. À cela se mêle une large part de doute quant à la véracité de l'histoire et la possibilité que cela se reproduise pour soi-même, normalement facilitée par l'application de la règle « le narrateur ne ment jamais au lecteur ». Avec la sueur ou le frisson dans le dos, cela fait partie des sentiments recherchés dans les creepypastas, au contraire du dégoût que peut inspirer le gore seul ou de la pitié que l'on peut ressentir devant la mort ou un évènement dramatique.
Après avoir traité des creepypastas en comparaison avec d'autres genre et en mettant en avant ce qu'elles ne sont pas, je vais brièvement énoncer quelques règles générales sur ce que sont ou peuvent être les creepypastas, en rappelant quelques détails déjà mentionnés plus haut et en en ajoutant quelques uns sur les creepypastas non-textuelles qui, du fait de la prolifération du genre écrit, sont de plus en plus les occultées malgré les tentatives de certains auteurs de retourner aux sources.
Les creepypastas sont des histoires transmises par internet sous divers supports, qu'il s'agisse de textes, d'images, de vidéos, de pistes audio, de jeux ou de supports multimédias quelconques. On peut les retrouver sous diverses extensions et elles ne connaissent, à ce niveau-là, aucune limite (il serait donc parfaitement cohérent de trouver une creepypasta sur un PowerPoint, un fichier .bat ou encore une entrée de Bloc Note jointe à une « copie inoffensive » dudit fichier). Les creepypastas se veulent, comme leur nom l'indique, creepy (voir définition plus haut), et jouent pour ce faire sur certains éléments humains comme la crainte de l'inconnu ou la destruction des croyances héritées de l'enfance d'une manière subtile.
Quand les creepypastas sur les jeux vidéo se limitent souvent à une cartouche maudite se comportant comme un jeu glitché voire hacké, ce qui explique la difficulté d'innover dans le genre, les supports tels que les images, les vidéos et les pistes audio sont souvent utilisés de manière à transformer un élément familier en quelque chose d'inquiétant ou au moins d'intriguant, ou bien pour déstabiliser complètement la personne les jouant sur son ordinateur, soit avant d'en lire l'histoire, soit pour illustrer une légende urbaine. Cette dernière tendance joue énormément sur le doute installé par l'histoire et vise à mettre à l'épreuve la personne, lui donnant envie de se prouver que la légende n'est pas vraie tout en l'inquiétant sur les conséquences présumées de la lecture du fichier.
De manière générale, elles transmettent une histoire numériquement en s'appuyant sur un ou plusieurs supports, qui eux ne sont pas forcément numériques de prime abord, peuvent se limiter au simple récit de l'histoire mais aussi présenter des dossiers complets, accompagnés ou non de quelques lignes les étayant, et sont transmises à la manière d'une histoire que l'on raconterait au coin du feu un soir d'Halloween ou après avoir découvert un secret qui ne demande qu'à être amené à la connaissance du plus de monde possible. Ce dernier aspect exclut donc les histoires basées sur des faits qu'un grand nombre de personnes tient pour acquis et qui n'amènent rien de nouveau qui puisse justifier le récit de cette histoire-là plutôt qu'une autre.
Leur fond ne suit pas beaucoup de règle, l'important étant la sensation de papillons dans le ventre ou (au choix) de frisson parcourant l'échine provoquée à la découverte de la création. Il existe néanmoins un certain nombre de clichés qui ont fonctionné pour les premières creepypastas les utilisant mais ont tellement été empruntés par la suite qu'ils ont finit par donner des créations apparentées à un plagiat déguisé et ne sont aujourd'hui presque plus utilisables. Par ailleurs, les thèmes moralisateurs ou fantasmagoriques sont en général exclus car ils occultent l'objectif premier des creepypastas. En revanche, tout peut être prétexte à la rédaction d'une creepypasta si la ressemblance avec une légende urbaine est accessible.
Ceci conclut cet essai sur la définition des creepypastas. Il est possible que j'aie involontairement occultés certains aspects, auquel cas vous pouvez me demander une amélioration ou un ajout. Quelques confusions sont également possibles dans le texte, et je vous invite à me les indiquer pour que je puisse corriger au plus vite. Comme je l'ai fait au début, je tiens à rappeler que cette production est basée exclusivement sur la vision que j'ai développée des creepypastas via mes expériences au sein de leur monde, et je ne saurais imposer mon avis comme la voix à suivre tant qu'il n'aura pas été consulté et validé par d'autres personnes expérimentées du domaine. Merci à ceux qui auront pris la peine de lire jusqu'au bout !
Commentaires
Et bien mon cher Magno je te félicite!!
Déjà ce texte suppose un travail assez vertigineux tant dans le fond que dans la forme, et puis proposer un manifeste de la creepypasta est osé!!
Mais nécessaire visiblement!
Bravo à toi pour ton très bon travail et je te souhaite qu'il soit lu et débattu par le plus grand nombre!!
Cordialement,
Co-